lundi 13 décembre 2010

Interview sur le nouvel an musulman

Je reprends ici (à cause de sa pertinence, une interview que j’avais accordée au Journal Ténéré Express No 12 du mardi 27 mars 2001 sur le nouvel an musulman.
Je précise que c’est parce que le 1er Mouharram (ou nouvel an) n’est pas considéré comme une fête qu’il n’y a pas de présentation de vœux comme durant la fête de Ramadan ou de Tabaski. Ceci explique pourquoi nous ne le faisons pas car nous n’inventons rien en matière de religion ni n’y ajoutons ni n’en diminuions rien, nous ne faisons que suivre ce qui a été parachevé par Dieu le Parfait. A quoi sert réellement de fêter le Nouvel an musulman et de ne plus en tenir compte dans la vie et les affaires?
Comme nous l’avons tous vu et remarqué aucun non-musulman ne s’est intéressé au nouvel an musulman en présentant des vœux à leurs confrères ou en les présentant  aux musulmans. 
Mais que fait le monde musulman à l’approche du Noël, durant le Noël et le 1er janvier? N'est-ce pas que nous faisons plus de tapage, de festivités et de cérémonies durant ces deux évènements que certains chrétiens?
N’est-ce pas que la religion est un choix que l’on fait, que l’on doit respecter et dont on subira les conséquences bonnes ou mauvaises? Peut-on suivre deux religions différentes à la fois?
Jugez-en s’il vous plaît!

Interview sur le Nouvel An Musulman
Propos recueilli  par Amadou Tiémogo
Publié dans Ténéré Express no 12 du Mardi 27 mars 2001

Q- Le lundi prochain, la communauté musulmane célébrera son nouvel an.  Pourquoi cette célébration et quelle est l'importance de ce nouvel an dans le concept religieux?
R: En réalité, il n'y a pas de célébration du nouvel an en Islam mais on peut dire que les musulmans entameront lundi prochain une nouvelle année.  En Islam, nous avons seulement deux fêtes annuelles: la fête de Ramadan et celle de Tabaski.  A ces deux fêtes annuelles s'ajoute une fête hebdomadaire le jour de chaque vendredi.  Toutes ces trois fêtes sont fixées par la loi islamique à travers le Saint Coran et/ou les Hadîs (paroles) du Prophète prière et salut d'Allah sur lui, et nul n'a le droit d'ajouter une autre fête aux musulmans religieusement parlant.
Mais, quant à l'importance de ce nouvel an dans le concept religieux islamique, c'est que la fin d'une année nous interpelle à faire le bilan de nos actions: qu'est-ce que nous avons fait de positif dans l'année passée sachant qu'elle témoignera pour ou contre nous conformément à la nature de l'œuvre que nous avions accomplie dedans? Et comment comptons-nous accueillir la nouvelle année? Que l'intelligent parmi nous fasse le bilan de ses actions, s'il y trouve une défaillance ou manquement, qu'il se repente et qu'il décide à se rattraper pendant qu'il est temps. S'il trouve qu'il est sur le bon chemin, qu'il remercie son Seigneur et qu'il Lui demande la constance dans cette voie jusqu'à la mort. La fin d'une année nous montre que le monde dans lequel nous vivons n'est pas stable, il est plutôt évolutif. Et dans son évolution il y a des leçons, et dans le changement des situations il y a des exhortations. Nous devons savoir que chaque jour qui passe nous éloigne de ce bas-monde et nous rapproche de l'au-delà. Mais plutôt chaque seconde qui passe est une partie de la vie qui s'est écoulée, qui ne revient plus et qui ne sera pas compensée non plus. Qu'est-ce  que  la  vie   de l'Homme  sinon  des  années  déterminées? Or l'année est-elle  autre  chose  que  des  mois connus? Et le mois est-il  composé d'autre chose que des jours?  Et chacun de nous sait que le jour c'est vingt quatre heures [24 h] et l'heure c'est soixante minutes [60 mn], et la minute c'est  soixante  secondes  [60 s]. Ainsi chaque seconde qui  passe  fait  rapprocher  l'Homme  de sa fin et le fait éloigner en même temps de  ce  bas  monde  et  ce  qu'il contient.  Donc   toute   œuvre   à  laquelle se  voue l'Homme,  est  une  façon de consommer sa vie, le fait même  de manger pour entretenir la vie, est une phase de  consommation de la vie car il prend du temps, et le temps  c'est  la  vie  qui  est plus chère que l'argent que les Anglais tiennent à la place du temps. Ils disent : «Time is money». Et nous leur disons plutôt : «Time is life».   
Q: A quoi les musulmans doivent-ils consacrer cette journée?
R: Il n'y a aucune activité ni adoration ni festivité particulières marquant le nouvel an en Islam. Même le fait de rendre cette journée fériée n’a aucun fondement religieux. S’il y a un jour à rendre férié pour les musulmans ce sera avant tout le jour de vendredi pour leur permettre de se préparer et de bien accomplir la prière de vendredi. Outre le jour de vendredi, il y a deux autres jours plus importants dans lesquels des adorations islamiques sont légiférées à savoir le jour d’Arafa (le 9 Zoul-Hiddjah) et le jour d’Achoura (le 10 Mouharram). Ces deux jours méritent d’être fériés que le 1er Mouharram et le 27 Ramadan.
Q: Pourquoi le Niger a-t-il tardé à inscrire dans ses annales la célébration de cette journée au même titre que les autres fêtes nationales et celles prévues par le calendrier gréco-romain?
R: Nous savons tous que c'est suite à la visite du Guide de la Révolution Libyenne au Niger le 8 mai 1997, que les autorités nigériennes ont décidé d'inscrire le ler jour du calendrier musulman dans leurs annales.  Cela n'a aucune portée religieuse mais plutôt politique par opposition à la fête du nouvel an du calendrier gréco-romain.  Nous ne pouvons que déplorer l'ignorance et la naïveté des musulmans, ignorance qui fait qu'ils ne distinguent point entre Islam et politique, entre Islam et arabisme, entre Islam et comportements des musulmans... La célébration du nouvel an musulman par opposition au nouvel an chrétien est comparable à l'anecdote d'un jeune arabe parti en études dans un pays européen.  Un jour il entendit ses collègues parler de Jésus en affirmant que c'est le fils de Dieu, alors pris par la jalousie pour sa religion, le jeune arabe intervint en disant: «Vous mentez, ce n'est pas Jésus qui est fils de Dieu mais Mohamed».  Ce jeune musulman croyait donc défendre l'Islam mais dans son ignorance il a dit quelque chose de plus grave aux yeux de l’Islam que son silence: le fait d'attribuer à Allah un fils.  Nous aussi, dans notre jalousie nous voulons résoudre un problème par un autre plus grave encore: celui de l'innovation dans la religion d'Allah.  Si nous voulons respecter le calendrier musulman, nous devons l'adopter en entier dans nos affaires et compter notre temps selon ce calendrier mais à quoi bon de célébrer -même si cela est permis- le ler Mouharram et puis compter avec un autre calendrier?  Voilà ce qu’on appelle: «Clignotant à droite, virage à gauche». Si la célébration du 1er Mouharram était islamique, les savants musulmans en auraient parlé depuis longtemps.
Q: Notre pays est à plus de 90 % musulman, on constate tout de même que chaque année, le ler janvier du calendrier gréco-romain est beaucoup plus célébré dans les familles que le nouvel an musulman.  Quelle appréciation avez-vous de cet état de fait?
La célébration du 1er janvier du calendrier gréco-romain est purement politique et vous savez, tout ce à quoi le politique accorde de l’importance devient du coup important aux yeux du peuple. Mais ce qui est déplorable voire condamnable c’est le fait de voir des musulmans imiter les autres peuples jusque dans leur façon de célébrer leur fête, leur rituel et leur cérémonial. Or l’imitation en Islam n’est pas un simple acte vulgaire sans conséquence, c’est pourquoi le Prophète prière et salut d’Allah sur lui a dit: «Quiconque imite un peuple, eh bien il en fait partie». Comment être musulman et imiter d’autres peuples non musulmans jusque dans leur façon de célébrer leur fête?  Ce comportement ne fait que confirmer la prophétie du Messager  d'Allah, Mouhammad, prière et  salut  d’Allah sur  lui: «Vous suivrez très certainement  les pas de ceux qui vous ont précédés empan   par  empan,  coudée par coudée, au point d'entrer  dans  le  trou  de l'Uromastix (espèce de lézard) s'ils y entrent», on demanda: "Les juifs et les  chrétiens?". Il  répondit: «Qui  donc sinon eux?». 
Quant au nouvel an musulman, nous voulons bien que les musulmans en prennent conscience et adoptent surtout le calendrier islamique, mais sans pour autant innover des fêtes qui n’existent pas en Islam.
Q: Le calendrier gréco-romain a été établi à partir du jour de la naissance de Jésus.  Pour le calendrier, musulman quel est son point de départ ou sa date historique?  Et comment faire pour passer d'un calendrier à un autre autrement dit comment convertir le grégorien en hégirien et vice-versa?
Le point de départ du calendrier musulman est la date historique de l’émigration du Prophète prière et salut d’Allah sur lui et de ses compagnons de la Mecque à Médine. Cette date correspond en l’an 622 de l’ère chrétienne.
Allah nous a donné un moyen mathématique permettant la conversion des dates c’est-à-dire le passage du calendrier grégorien au calendrier hégirien et vice-versa?  
Allah le Très Haut a dit: «Ils demeurèrent dans leur caverne trois cents ans et en ajoutèrent neuf (ans)». Sourate 18, verset 25.
Le rapport (300/309 = 0,97) nous permet de passer du calendrier lunaire au calendrier grégorien et vice-versa? Comment cela se fait?
Pour passer du calendrier musulman au calendrier grégorien, on multiplie le premier par ce rapport (300/309 = 0,97) puis on ajoute au résultat 622 qui est la date correspondante au début du calendrier hégirien. Exemple:
1421 H = (1421 x 0,97 = 1378,37) + 622 = 2000,37 soit 2000  (1421 est à cheval entre 2000 et 2001).
Pour passer du calendrier grégorien à l’hégirien, on soustrait du premier 622 puis on divise le résultat par le rapport (0,97). Exemple:
2000 = (2000 – 622 = 1378): 0,97 = 1420,6185 on arrondit à 1421H.

Cheikh Boureïma Abdou Daouda
Président du Bureau des Traductions Islamiques au Niger (BUTIN)

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