mercredi 4 janvier 2012

Arabie saoudite: au tour des femmes de vendre la lingerie féminine

Les Saoudiennes vont pouvoir se procurer des sous-vêtements sans passer par des hommes. À compter de jeudi, seules les femmes auront le droit de travailler dans les boutiques de lingerie féminine en vertu d'une décision royale dénoncée par les autorités religieuses.
Après un vif débat de société, le roi Abdallah a promulgué en juin dernier un décret donnant six mois aux magasins de lingerie pour remplacer leurs vendeurs, généralement asiatiques, par des vendeuses saoudiennes.
« C'est une décision positive et courageuse. Comme beaucoup de femmes, j'étais embarrassée de devoir acheter mes dessous d'un homme me posant des questions sur mes mensurations. » — Samar Mohammed, une institutrice de 37 ans
Cette mesure a été prise à la suite d'une campagne menée sur Internet par des femmes exprimant leur exaspération. Il y a plus d'un an, Rim Assaad avait appelé au boycottage des boutiques de lingerie féminine employant des hommes, « afin de mettre fin à l'embarras des femmes qui doivent s'adresser à des vendeurs ».
« Finie la gêne », claironnait quant à elle mardi Fatima Qaroub, qui réclamait sur le web la féminisation des emplois dans la lingerie féminine. « Les commerçants, au début, ont mal accueilli la décision des autorités, mais après avoir employé des femmes saoudiennes, certains ont même étendu l'expérience aux magasins d'habillement [en général] », faisait-elle remarquer.
44 000 Saoudiennes de plus au travail
Selon la ministre du Travail, Adel Faqih, cette décision royale concerne 7300 commerces et pourrait engendrer la création de 44 000 emplois pour les Saoudiennes. Elle s'appliquera dans un deuxième temps aux magasins de produits cosmétiques avant juillet 2012.
Fahd al-Takhifi, un responsable du ministère, a indiqué que plus de 28 000 femmes ont déjà soumis des demandes pour travailler dans ces deux secteurs. « Mais cela ne veut pas dire qu'elles seront toutes employées », a-t-il précisé. Quelque 400 inspecteurs du ministère s'assureront que la mesure est appliquée, les contrevenants s'exposant à des mesures punitives.
Safa Salama s'est dite enchantée d'avoir obtenu un poste de directrice d'un magasin de lingerie dans un centre commercial de Djeddah, ville portuaire de l'ouest du pays. « Je travaillais comme stagiaire non payée dans une maternité jusqu'à ce qu'une amie m'informe que les magasins de lingerie cherchaient du personnel, a-t-elle affirmé. J'avais un peu peur au début, mais tout se passe bien. »
Une mesure « contraire à la religion »
L'entrée en vigueur de la décision contrarie le mufti d'Arabie saoudite, le cheikh Abel Aziz Al-Cheikh, qui a déploré vendredi lors de son sermon que les vendeuses soient « en contact direct » avec les hommes qui gèrent les commerces. « Les femmes vont vendre et compter l'argent », ce qui est « contraire à la religion », a-t-il ajouté.
Il y a trois ans, une décision royale avait déjà autorisé les Saoudiennes à travailler dans les magasins de lingerie. Elle avait toutefois été bloquée par les religieux ultraconservateurs qui s'opposent au travail des femmes dans plusieurs secteurs d'activités du royaume, où la ségrégation sexuelle est rigoureusement imposée.

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